Question détaillée
Comment peut-on percevoir la justice d’Allah dans les évènements de Karbala ? Pourquoi Allah n’est-Il pas intervenu lorsque l’Imam Hussain a été tué et que Bibi Sakina a été torturée ?
Par ailleurs, si Syeda Zaynab (s.a.) a déclaré qu’elle n’a vu que de la beauté, pourquoi y a-t-il eu autant de pleurs et de lamentations ?
Ces évènements faisaient-ils partie de la satisfaction d’Allah ?
Je suis tourmenté par ces doutes, mais je cherche sincèrement des réponses raisonnables.
Réponse
À l’époque de l’Imām al-Ḥusayn (as), la situation religieuse et politique était telle qu’une intervention décisive devenait nécessaire pour contrer le déclin spirituel de la communauté musulmane et l’oppression exercée par le pouvoir en place, représenté par Yazīd. Le seul moyen de raviver l’authenticité de l’islam et d’éveiller les consciences endormies était le sacrifice de l’Imām. Ce geste n’était pas simplement un acte de révolte, mais une nécessité historique et divine inscrite dans l’ordre naturel voulu par Allah (swt).
En effet, le principe divin repose sur le respect du libre arbitre et de l’épreuve dans ce monde. Allah (swt) n’intervient pas de manière surnaturelle pour annuler les lois qu’Il a Lui-même instaurées dans le cadre de l’épreuve terrestre. Ainsi, la voie naturelle par laquelle l’islam pouvait être sauvé à cette époque passait par le martyre (shahāda) de l’Imām al-Ḥusayn (as). L’injustice que ce dernier a subie n’était pas une manifestation d’iniquité divine, mais une épreuve destinée à élever son rang et à établir un repère éternel pour les générations à venir.
Le sens des épreuves dans la perspective islamique
Les épreuves que traverse un être humain sont autant d’occasions de croissance spirituelle. Plus une personne occupe un rang élevé auprès de Dieu, plus les épreuves qu’elle rencontre sont intenses. L’Imām al-Ḥusayn (as), en tant que sommet de la perfection humaine après le Prophète (saw), a été confronté à la plus grande des épreuves, ce qui lui a valu la station la plus élevée parmi les martyrs : Sayyid al-Shuhadāʾ (le Maître des martyrs). Or, Allah (swt) ne soumet aucun être à une épreuve qu’il ne peut supporter. Ce degré d’épreuve correspondait donc à la grandeur spirituelle unique de l’Imām.
Il serait donc erroné de considérer les événements de Karbalāʾ comme une injustice infligée à l’Imām. Bien au contraire, cette tragédie, dans sa profondeur spirituelle, constitue une immense manifestation de la miséricorde divine, tant pour l’Imām lui-même que pour la communauté islamique.
Deux regards sur les tribulations de Karbalāʾ
La tragédie de l’Achoura peut être appréhendée selon deux perspectives :
- La perspective extérieure et mondaine, marquée par la douleur, la perte, la souffrance, l’injustice, la solitude, la torture, le massacre des proches, l’humiliation, et l’indignité subie par les plus nobles des créatures. Cette réalité a profondément affecté Sayyida Zaynab (sa) et les membres de la famille du Prophète (saw), qui ont pleuré pour ces souffrances. Pleurer pour l’Imām al-Ḥusayn (as) est naturel et légitime, car les personnes les plus pures et les plus généreuses de cette terre ont été privées d’eau, battues, insultées et tuées. La douleur ressentie par Sayyida Zaynab (sa) était à la hauteur de sa compréhension de la noblesse de l’Imām.
 - La perspective intérieure et spirituelle, elle, révèle une autre dimension de Karbalāʾ : celle de l’amour pur pour Allah (swt), de la soumission totale (taṣlīm), de la sincérité, de la loyauté, de la patience, de la fraternité, de la taqwā, et du sacrifice suprême pour préserver l’islam. C’est dans ce sens que Sayyida Zaynab (sa) a déclaré : « Je n’ai vu que de la beauté », en percevant dans cette tragédie l’éclat spirituel du martyre et la grandeur du dévouement absolu.
 
La satisfaction divine (Riḍāʾ Allāh)
Le Riḍāʾ Allāh — la satisfaction divine — réside dans la guidance de l’humanité et sa progression vers la perfection spirituelle. Or, cette guidance ne pouvait se maintenir que par la continuité et l’établissement de l’islam authentique. L’Imām al-Ḥusayn (as) a assumé la responsabilité de cette mission à un moment critique de l’histoire, mettant sa vie en jeu pour garantir cette continuité. Ce sacrifice a assuré à la fois sa propre élévation spirituelle et la préservation de la religion.
Ainsi, loin d’être une tragédie vide de sens, l’événement de l’Achoura constitue une lumière éternelle pour les cœurs sincères et un sommet de spiritualité dans l’histoire de l’humanité.
Qu’Allah nous donne la tawfiq de pleurer sincèrement pour notre Imam et de suivre son chemin de soumission totale à Allah.
Yassir R.
